La Bolivie se retire de la Convention Unique

La Bolivie entend se retirer de la Convention Unique sur les stupéfiants afin de protester contre la classification de la feuille de coca comme drogue illégal. Le président Evo Morales, le chef d’un état qui compte parmi les plus gros producteurs de coca, a demandé au Congrès de voter une loi permettant à la Bolivie de se retirer de la convention des Nations Unies de 1961 sur les stupéfiants, dite Convention Unique.

 

Le gouvernement affirme que la convention est contraire à la constitution bolivienne qui stipule que le pays se doit de préserver et de protéger la mastication de feuilles de coca, en tant que pratique ancestrale et patrimoine culturel.

La Bolivie a longtemps soutenu que la coca, dans son état naturel, n’est pas une drogue illicite. La plante est légalement cultivée dans le pays à des fins médicinales et traditionnelles. Une tentative menée à l’échelon international en janvier dernier a échoué à obtenir le retrait de la feuille de coca de la liste de l’ONU, de telle sorte que le gouvernement souhaite désormais se retirer de la convention.

Selon le projet de loi, qui a déjà passé la chambre basse du congrès et devrait faire de même au sénat où le parti de M. Morales est majoritaire aux deux-tiers, la Bolivie continuerait de remplir ses obligations internationales en matière de lutte contre le trafic de drogue. Le ministre des Affaires Etrangères, M. David Choquehuanca a déclaré que le pays pourrait de nouveau rejoindre la Convention dès l’année prochaine, à une seule réserve: que la feuille de coca reçoive l’autorisation d’être légalement consommée.

« Il s’agit d’une tentative pour conserver la pratique culturelle et inoffensive que représente la mastication de la feuille de coca. C’est aussi une question de respect des droits humains, pour tous les Boliviens pour qui c’est une pratique ancestrale et non pas seulement pour les populations autochtones » a déclaré M. Choquehuanca

L’opposition soutient que le gouvernement est en train de baisser les bras face aux trafiquants. « Nous sommes en train de donner une image déplorable de notre pays au plan international » a déclaré le député d’opposition M. Mauricio Muñoz. « Il y aura des conséquences désastreuses et irréversibles pour la Bolivie. Nous pensons que le président est en train de suivre la mauvaise voie, celle de ne plus combattre avec force le trafic de drogues ».

La Bolivie est le troisième plus grand producteur de coca dans le monde, dont une grande partie est illégalement transformée en cocaïne, à destination des marchés brésiliens et européens. Tout en ayant admis que la culture de coca a augmenté dans le pays, la Bolivie continue d’affirmer qu’elle ne pourra pas enrayer le trafic sans une réduction de la consommation de cocaïne des pays occidentaux.

Le réseau TNI/WOLA soutient la décision bolivienne

« Le Transnational Institute et le Washington Office in Latin America (TNI/WOLA) veulent exprimer leur compréhension et leur soutien en faveur de la décision prise par le gouvernement de M. Evo Morales, en accord avec la législation bolivienne. Après le rejet son amendement en janvier dernier, le gouvernement n’a eu d’autre choix que d’envisager un retrait pur et simple de la convention afin d’harmoniser ses obligations internationales et sa nouvelle Constitution qui lui permet dans un délai de quatre ans « de dénoncer ou de renégocier les traités internationaux susceptibles d’être contraires à la constitution.

« Selon la nouvelle Constitution de 2009: « L’Etat s’engage à protéger l’ancestrale feuille de coca en tant que patrimoine culturel, ressource naturelle et renouvelable propre à la biodiversité bolivienne et facteur de cohésion sociale. Dans son état naturel, il ne s’agit pas d’un stupéfiant; sa valorisation, sa commercialisation et son industrialisation devront être réglementés de par la loi. » (article 384).
Selon nous, les restrictions imposées par la Convention Unique sur la feuille de coca et sur ses utilisations traditionnelles ont représenté, en l’absence de tout élément de preuve quant à leur nocivité, une erreur historique et une violation des droits des populations autochtones. Selon les termes du traité, la deuxième procédure possible pour remédier à cette erreur – en dehors de l’amendement qui a déjà été rejeté – est une révision de la classification de la feuille de coca par l’Organisation Mondiale de la Santé. La Bolivie considère que la durée d’une telle procédure dépasserait le terme des quatre années imposé par la Constitution.

« Nous en appelons à la communauté internationale pour qu’elle exprime sa compréhension et son soutien vis-à-vis de la décision prise par le gouvernement colombien. D’autres pays ayant des conflits juridiques comparables sur le statut de la feuille de coca, tels que le Pérou, la Colombie ou l’Argentine, seraient bien avisés de suivre l’exemple de la Bolivie et/ou d’entreprendre le long processus de révision par l’OMS.

Texte de la convention unique de 1961