La société civile s’engage pour l’UNGASS: Drogues et santé

La contribution des acteurs de la société civile à l'UNGASS 2016 sur le thème "Drogues et santé"

En Avril 2016, l'Assemblée générale des Nations Unies tiendra une session extraordinaire (UNGASS) sur le problème mondial des drogues. En vingt ans, il s’agit de l’opportunité la plus importante d’organiser des débats de fonds sur ce thème. Les organisations de la société civile peuvent jouer un rôle substantiel dans la préparation de cette réunion; c’est la raison pour laquelle le Comité de Vienne des ONG sur les drogues (VNGOC) et le Comité de New York des ONG sur les drogues (NYNGOC) ont lancé conjointement le Groupe de travail de la société civile (CSTF).

Le CSTF a pour objectif d'assurer la participation de la société civile au processus préparatoire de l'UNGASS. L'une de ses tâches principales a été la mise en œuvre d’une enquête mondiale (Global Civil Society Survey) conçue pour donner un aperçu du travail des ONG actives dans le domaine des drogues, tout en soulignant les priorités et les préoccupations-clé sur lesquelles l'UNGASS devra se pencher. L’enquête représente aussi un moyen de mesurer le niveau d'engagement des ONG et leur intérêt à participer à la préparation de l'UNGASS.

Le VNGOC et le NYNGOC ont publié un document qui comprend des recommandations et des domaines prioritaires afin qu’ils soient inclus dans le document final de l'UNGASS. Ces recommandations sont basées sur une compilation préliminaire des résultats de l’enquête, ainsi que sur les précédentes collaborations de la société civile. Cependant, étant donné que les consultations régionales et thématiques n’ont pas encore été finalisées et que plusieurs versions étrangères sont encore en attente de traduction, le document final comprendra font probablement des informations et des recommandations supplémentaires.

Ces recommandations et priorités ont été organisées en fonction des cinq domaines thématiques de l'UNGASS 2016: drogues et santé, drogue et crime, droits humains, femmes, enfants et communautés, nouveaux défis, et développement alternatif. (Le document complet est disponible ici – version anglaise). En tant que membre du VNGOC Dianova a décidé de publier les principaux éléments de ce document, en commençant par la première section consacrée à « Drogues et santé » – le présent article est également disponible en anglais et espagnol.

Nécessité d'une prévention des drogues validée scientifiquement

Il est nécessaire de débattre de l’importance des initiatives de prévention scientifiquement validées, à l'échelle mondiale, et s’adressant en particulier aux jeunes. La prévention des drogues devrait inclure des stratégies environnementales de prévention ainsi que des interventions précoces auprès des jeunes et des adultes engagés dans des comportements à risques,  afin d'éviter l’usage de drogues et le passage à la dépendance. Les organisations de la société civile soulignent que la prévention des drogues devrait également fournir des informations objectives sur les effets des différentes substances sur l’organisme et les risques associés à leur usage (…)

Mise en œuvre et disponibilité généralisée de la réduction des méfaits

La réduction des méfaits est une priorité pour la plupart des organisations de la société civile œuvrant dans le domaine des drogues. Les services de réduction des méfaits devraient être largement disponibles et librement accessibles à tous les usagers de drogues, indépendamment de leur nationalité, de leur origine ethnique, de leur âge, de leur sexe, de leur situation sociale ou de toute autre caractéristique démographique. Des matériels d'injection et des seringues stériles devraient être mis à disposition de tous les usagers de drogues, y compris les personnes incarcérées. La mise à disposition de la Naloxone en tant qu’outil de prévention de la mort par surdose est jugée cruciale, et il est nécessaire de faire davantage d’efforts dans ce sens. (…)

Préoccupations relatives au financement des services de traitement, de prévention et autres à l’attention des usagers de drogues

Au plan mondial, les financements disponibles pour les programmes de réduction des méfaits, les services de traitement et les programmes de prévention scientifiquement validés manquent cruellement. Ces contraintes financières sont une limite à la disponibilité et à l'accessibilité de ces services de santé pour les usagers de drogues (…)

Les gouvernements et les agences des Nations Unies (notamment l’UNODC) devraient examiner la proportion des ressources allant à la prévention, à la réduction des méfaits et aux services de traitement des problèmes liés aux drogues, comparativement à, et dans le contexte des dépenses engagées dans les mesures de réduction de l'offre.

Un traitement des dépendances universellement disponible, scientifiquement validé et culturellement adaptés

Il est crucial que les services de traitement des dépendances soient scientifiquement validés et culturellement adaptés. Ces services doivent  être accessibles à tous ceux qui en font la demande, en étant gratuits ou abordables – de même qu’ils doivent comprendre un accès aux soins médicaux et de santé mentale pour les usagers présentant des besoins plus complexes, ainsi que la possibilité d’intégrer les familles dans le parcours de soins (en particulier pour les plus jeunes). Les services de traitement des dépendances devraient pouvoir se baser sur diverses approches et objectifs –  notamment en ce qui concerne le choix de l’abstinence ou celui de la réduction des méfaits (…)

La nécessité d'une réponse de santé publique à l'usage de drogues

La société civile a clairement exprimé la nécessité d’apporter une réponse de santé publique aux  problèmes liés à l'usage de drogues (…)

Certains groupes de la société civile estiment que la criminalisation des usagers de drogues a eu des conséquences négatives pour leur santé et pour la société en général. De nombreux acteurs de la société civile plaident pour une décriminalisation ou une dépénalisation des usagers de drogues avec la possibilité d’être référés vers des services de traitement et de réhabilitation, et promouvant également des services de réduction des méfaits. Certains acteurs de la société civile soutiennent  que la légalisation et la réglementation du marché des drogues représente un moyen d'améliorer la santé globale des usagers de drogues, par le biais d’un contrôle de la qualité des produits et de marchés plus sûr. D’autres au contraire campent de façon ferme en faveur d’une interprétation traditionnelle des conventions.

Nécessité d’aborder les questions de la stigmatisation, de la discrimination et de la réinsertion, afin de promouvoir la santé et le bien-être des usagers

Il existe une préoccupation importante concernant l’impact sociétal plus large de de la stigmatisation sur la santé et le bien-être des usagers. Les usagers de drogues sont souvent considérés comme immoraux, criminels, voire les deux à la fois. De nombreux acteurs de la société civile soulignent qu’une telle stigmatisation a des conséquences sur la santé des personnes, étant donné que ces dernières peuvent être amenées à éviter les services de santé et/ou à recevoir des services inadéquats de la part des acteurs de santé, ce qui participe à augmenter les disparités en matière de santé. Malheureusement, la stigmatisation de l’usage de drogues conduit à une discrimination à l’endroit des usagers que certains considèrent justifiée. En outre, il est nécessaire de soutenir davantage les anciens usagers dans leur parcours de réinsertion sociale.